Sur les animaux de ferme en général

L’équilibre agro-sylvo-pastoral, qui a prévalu durant des siècles dans les campagnes, doit une part essentielle au monde animal. Aujourd’hui encore, bien des activités d’entretien des espaces de montagne, des prairies permanentes, des steppes, dépendent totalement de l’activité pastorale. Deux tiers des surfaces agricoles utiles de la planète servent à l’élevage car ils ne peuvent être utilisés autrement. Le tiers restant, c’est à dire les surfaces dédiées aux céréales, maraîchage, arboriculture, pépinière et viticulture, était traditionnellement dépendant des animaux : force de travail, fumiers, valorisation des pailles dans les litières, pour ne citer que ces aspects-là.

Aujourd’hui, bien des régions sont spécialisées en grandes cultures et les animaux ont été bannis. L’équilibre agro-sylvo-pastoral a été rompu et cela a entraîné des conséquences dramatiques qui sont apparues progressivement. L’arrachage des arbres, des haies, des bosquets, a eu pour conséquence la disparition d’oiseaux et d’insectes très utiles pour contenir certains prédateurs des cultures. À force d’éliminer l’animal, il est revenu au galop sous forme parasitaire. Une haie n’est pas seulement un alignement d’arbres. C’est un écosystème (ou organe du paysage), qui apporte des bénéfices considérables pour les cultures, car oiseaux, insectes, plantes accompagnatrices, champignons et autres auxiliaires, y trouvent leur abri et nous aident à équilibrer nos cultures.

La réintroduction d’animaux d’élevage dans certaines zones vidées de toute animalité permet de recréer de nouveaux équilibres, de refaçonner le paysage, de fertiliser les sols avec du fumier bienfaisant et de se relier à nouveau à nos compagnons de route.

À l’inverse, dans les zones spécialisées en élevage intensif, un retournement devra nécessairement s’opérer tôt ou tard car la question des effluents d’élevage pose des problèmes à toute la société. L’agriculture et l’élevage touchent tout le monde : quelle alimentation voulons-nous ? Quels paysages voulons-nous ?

Chaque espèce domestique (une centaine seulement depuis le néolithique) a trouvé sa place dans l’organisme agricole partout sur terre. Les volailles n’ont pas le même rôle agronomique que les ruminants ou le porc. Ce dernier est le grand transformateur des sous-produits de la ferme : petit-lait de la fromagerie, son et petites céréales, légumes invendables, pain dur, céréales secondaires et légumineuses dans la rotation de cultures et pâturages sans oublier les bois et les taillis.

En agriculture biodynamique, certaines espèces tiennent une place centrale comme l’abeille et la vache, mais aucune espèce n’est « supérieure » à une autre. Chacune a sa juste place en fonction des terroirs secs ou humides, chauds ou froids. À une époque où la question animale est devenue un sujet passionné de débat sociétal, il est urgent de plaider la cause animale de façon posée, par une approche phénoménologique et par des approches de communication animale pour être au plus près de ce que l’animal souhaite, et non ce que nous projetons subjectivement sur lui. C’est l’animal qui nous dit comment il va au niveau de sa santé, de sa fécondité, de son état psychique. Un animal élevé sans respecter son biotope d’origine tombera malade ou nécessitera des traitements fréquents, alors que dans des conditions d’élevage optimales, il sera fertile, productif et sain.

Texte de René Becker

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